▲ Exécrable vermine, tu étouffes à chaque battement de cils. Non, ton cœur ne s'arrêtera pas Marie, ni de battre, ni de pleurer. D'ailleurs depuis le temps que tu pleures vainement, tu aurais dû comprendre, les autres ont abandonné mais toi tu continues. 19 ans que tu pleures et cela ne semble pas assez long pour toi. Tu te languis de ton frère, absent, parti trop vite. Tous sont partis trop vite à ton contact. Non, tu n'es pas maudite et tes prières n'y changeront rien. Je t'ai choisi, enfant martyr d'une époque perdue. Tu tomberas entrainant les autres à leur perte, entrainant les sanglots long des hivers perdus auprès de tes seins. Les innocents font toujours pleurer ... ▲

Il parait que du haut de leur montagne des Andes, les Albatros pleurent. J’aimerai être un albatros, me faire bercer par le vent, éclatant les nuages de mon bec … m’envoler au loin pour oublier et ne jamais revenir. Ils m’ont dit que c’est impossible du fait de mon ossature et de la graisse qui m’enveloppe. J’ai arrêté de manger, ils m’ont prise pour une folle et je me suis brisée. Mes ailes n’étaient pas assez grandes et il était déjà parti pour pouvoir me rattraper …

Je suis née un 16 juin, il faisait chaud, ma mère criait. Elle n'a jamais voulu avoir d'enfant pour la punir m'ont père en a demandé deux. Il faut croire qu'elle l'a aimé un peu, du moins un temp. A l'époque où nous étions encore une famille « unie », je ne connaissais que les cris, la vase qui s'écrase et les larmes ... je pleurais de les voir s'entredéchirer, je pleurais parce qu'ils en étaient incapables. Mon frère, Hyppolite, se tenait toujours derrière moi. Son souffle chaud me rassurait, ses murmures aussi, sa main surtout. Elle remontait le long de mon bras, le caressait un peu pour finalement s'enfuir. Beaucoup se moquait de moi, il a été le seul à contempler mes sanglots, à deviner la signification de chacune de mes larmes, telle un archéologue il fouillait, creusait et découvrait des trésors. Mais il ne m'a jamais guéri, pourquoi faire après tout ? Ma mère qui était psychologue n'a jamais su le faire. Elle me regardait toujours avec horreur, j'étais belle oui, mais terriblement triste lorsqu'elle était près de moi. Et puis elle est partie, comme un coup de vent, emportant tout avec elle. Sans s'en rendre compte elle nous a abandonné, nous laissant dans la rue un soir d'hiver. J'avais froid, mais au fond de moi je brûlais et j'ai ri. J'ai ri parce que je ne voulais pas pleurer, elle n'en valait plus la peine.

La première fois que j'ai vu Bambi, je devais avoir sept ans, elle était déjà partie depuis un an et je passais mes après-midi chez une vieille Jamaïcaine. Mon frère détestait l'odeur qui régnait dans la piaule, moi je détestais les autres gamins. Ils criaient tout le temps, mon frère leur collait un pin et ils pleuraient, sans peine. Une douleur physique insignifiante. Ils n'étaient rien pour moi que des pantins que les adultes agitaient. J'aimais la solitude. Nous étions tous assis en tailleur devant la télé, scrutant chaque parcelle colorées qui s'animaient. Et puis la mère de Bambi est morte, des flots de larmes se sont déversés sur leur visage, c'était pitoyable, il ne savait pas pleurer, il ne pouvait comprendre le bien que cela pouvait faire, de ne plus avoir une mère derrière votre dos, épiant chacun de vos gestes, cherchant vainement à vous comprendre pour finalement vous prendre pour une folle. Elle était loin maintenant. Je riais, un rire fort qui les fait tous tressaillir. « Tu es une sorcière Marie, tu es cruelle ! » m'a chuchoté la petite Beth, je l'ai regardé un long moment, sourire aux lèvres et je lui ai répliqué que « Je ne suis pas cruelle, la vie est cruelle. » Une enfant triste à en mourir qui riait déjà du malheur des autres. Une peste.

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