des doobies bien chargés mal roulés, quelques pièces de monnaie, un lighter gravé («empire tested»), les clés de sa caisse du moment, celles du garage, un cutter. une cagoule, un pied-de-biche, un exemplaire du Bardo Thödol aux pages malmenées. la carabine de jaron yesbrick et du matériel explosif amateur..

CHANNEL UK REPORT
vendredi 02 septembre 2011, 22h40
Pas de rediffusion
(United-Kingdom, 2011, 46min)
title: working class youth, new born scuttlers?
real. Vance Meltham and Donald (Donnie) Thorn – CHANNEL UK / GEEZ Productions – UK 2011

le reportage lo-fi s'ouvre sur des images d'archives. la vidéo est de mauvaise qualité, l'image est pleine de grains. des jeunes à capuches et cagoules affrontent de nuit des policiers armés dans les rues de liverpool, à coups de pierres, de bouteilles vides et de fumigènes amateurs. une légende s'affiche sur l'écran. « if the bloodthirsty ruffians who perpetrate these outrages were to be shot down like mad-dogs when caught red-handed, the law would only be doing a swift duty to all whose lives are [worth more] than those of these savages. » en voix off, l'un des deux jeunes réalisateurs explique le but du reportage :
vance meltham donnie et moi, on se rend à liverpool pour interroger les passants et en apprendre un peu plus sur le phénomène « scally ».
s'en suit un montage d'une longue série de courtes interviews-réactions dans les rues de la ville.
vance meltham; (en interpellant les personnes au hasard); si je vous dis «scally», ça vous évoque quoi? vous savez ce que c'est?
une femme brune, la trentaine (en répétant le mot, en le déformant); «scully»? non, jamais entendu parler.
un homme très grand, la trentaine (en secouant la tête, interloqué); hmm, aucune idée, désolé.
une jeune fille, dents du bonheur (elle rigole); moi? je suis pas une scally. (elle désigne du doigts trois jeunes adolescents un peu plus loin) mais eux, ce sont des scally.
un jeune homme, la vingtaine; scally? ouais, c'est ces mecs, ces mecs des quartiers difficiles qui portent des vieux trackies rentrés dans leurs chaussettes, et une casquette quelque part sur le haut de leur tête.
deux jeunes filles; nous on les trouve sexy. (elles gloussent)
un jeune homme, visage tuméfié, dents cassées (s'emportant); ouais les scallies, hein? on s'en fout d'eux. moi j'vais te dire c'est quoi un scally. c'est un mec qui vole les gens dans la rue, ok? moi j'suis pas un scally ok, je fais pas ça, je travaille pour vivre. des mecs comme les scallies ils s'en foutent, ils te volent, ils te tabassent, ils font rien de leur vie, ils vont en prison, ils s'en foutent. ils fatiguent les gens qui vivent autour d'eux. tu vois mes dents? j'me suis fait arracher hier soir. mais c'est comme ça que c'est par ici, mec, on est pire que des chiens.
trois jeunes hommes, vingt-cinq ans; le genre de mecs qui sont ridicules. des stéréotypes. ils savent même pas parler correctement anglais. des suceurs de bite. des putains d'assistés.
un jeune punk, crête colorée; j'habite dans un HLM, tu vois, je sais bien c'est quoi un scally. passée une certaine heure le soir, ça devient dangereux de sortir. y a toujours des mecs qui trainent, bien équipés, couteaux, cutters, tout ça, et ils cherchent un truc à faire, ils ciblent principalement ceux qui sont pas du quartier pour les tabasser ou leur piquer leur fric. c'est pas un truc illégal pour eux, c'est comme ça qu'ils ont été formatés. et c'est comme ça dans la plupart des quartiers pauvres d'angleterre.
un jeune assis sur un banc, casquette, sourcil gauche rasé, cigarette (avec désinvolture, sourire hautain); ouais. c'est quelqu'un comme moi, un scally.
vance meltham (s'adressant à lui); quand est-ce que tu dirais que t'as tourné scally?
le jeune; jsais pas, vers quatorze-quinze ans. quand j'ai commencé à traîner avec mes potes, parce qu'on avait rien d'autre à faire.
vance meltham; tu dirais que c'est l'ambiance de ton quartier qui t'as influencé?
le jeune; ouais, totalement. tout le monde était comme ça près de chez moi. mais c'est cool.
vance meltham; en quoi c'est cool?
le jeune; adrénaline. stress. tu te fais courser par les flics et les gardes de sécurité. même quand tu fais rien, ils se mettent à te surveiller. les gens te regardent mal quand tu marches dans la rue, spécialement les vieux. et les autres jeunes nous haïssent, ils nous considèrent comme des loosers, et ils ont peut-être pas tord sur certains points. mais en même temps, ils se pissent dessus parce qu'ils savent qu'on est là pour foutre la merde. ça change. c'est pas ordinaire.
vance meltham; vous faites quoi exactement?
le jeune; écoute, ça dépend quelle nuit c'est et ce que chacun fait. si c'est vendredi soir, si on est chauds, alors on y va. le premier qui est trop sûr de lui, on le défonce. et si nous on est avec nos potes, et s'il est aussi avec ses potes, ça tourne au gros kick-off. mais y a des soirs, aussi, où on sait se tenir tranquilles, tu sais. c'est bon, on est normaux aussi.
vance meltham; tu trouves pas que les scallies ont une sorte de réputation négative?
le jeune; ouais, peut-être. mais je m'en fous. tu comprends, c'est pas les autres qui nous ont appelés «scallies». c'est nous qui nous sommes appelés comme ça. rien à foutre des outsiders. on n'a pas honte, tu vois. on s'en fout de savoir ce que vous pensez de nous. c'est ce qu'on est, parce que c'est la seule chose qu'on peut être ici, c'est tout, ok?

d'aussi loin que tu te souviennes, t'as toujours été un putain de sale scally, comme ton frère l'a été avant toi. t'avais même pas douze ans que t'étais déjà fourré avec les mecs de Toxteth et que tu te promenais déjà plus nulle part sans avoir sorti tes supers baskets profilées et ta capuche de looter. en quelque sorte, t'étais prédestiné. tu pouvais pas avoir vu le jour dans les HLM du quartier le plus dangereux de Liverpool sans mal tourner. si t'as emprunté le mauvais chemin, c'est parce qu'il n'y en a pas de bon pour toi. ucuc.

« I hate charvers, they're all cocks, burberry hats and burberry socks, earrings made of cheap fake gold, fag butts that they always hold. they wear them stupid sports clothes too, while they're 'bezzin' with their 'crew'. around the town, just hanging out, they all swear and scream and shout. they have a language called townie speak, drink white shite and get fucked all week. they're hair so full of hairspray it makes me gag, «'ere you mate, giv' us a fag». fookin' this and fookin' that, don't you 'dis' me burberry hat. «'scuze me mate I fucked ya mam», gi' us sum pennies to buy some scran. meeeh! you fuckin' bastard boggers, di' you like me adi' joggers? shut yer mouth or i'll shut it for yer, i don't need no court-room lawyer. going to prison is like fuckin' hardcore, waitin' in the dole line is such a bore, in me jail cell tha time don't pass, ('ere jus' don' tell anyone I got fuck'd in the ass)! me mums a slag an mi sis' a hoe, u take ta piss... but boferd? NO! thats why i'm retarded and can hardly speak, but i'm tha best an' you're a freak. well minted is the town cross, we can go down 'market and just doss. i like me ashlands and ta council estate. its those bastard charvers that I really hate! »

la vieille stéréo crache un son scouse hip-hop étourdissant qui raisonne contre les murs nus et blancs. vous êtes tous les sept dans le sous-sol de Kenny. il y a toi, Kenny, Pinball, Sparra, Wee-T et les deux filles, Shelagh et Kes. elles sont assises à l'écart de vous et mâchent bruyamment leurs chewing-gum en se faisant les ongles. de là où tu es, tu peux voir le string de Kes qui dépasse de son short lorsqu'elle se penche pour atteindre ses pieds. tu mates fixement ce petit bout de tissu qui suggère vicieusement les secrètes terres lunaires inférieures, et tu t'imagines t'y glisser lentement, doucement, tendrement. « Yossi, connard, t'as fini de mater le cul de Kes, putain? ça fait deux heures qu'on organise le truc sans que t'en branles une, merde. » ucuc.