→ LEVEL 2 ; établir le parcours en mangeant le plus possible de boules roses possibles "Je suis esclave de l'Époux infernal, celui qui a perdu les vierges folles. C'est bien ce démon-là. Ce n'est pas un spectre, ce n'est pas un fantôme. Je l'écoute faisant de l'infamie une gloire, de la cruauté un charme."
On est con à dix-sept ans.
Je salue, j'embrasse, je baise. Ma carcasse se laisse tomber sur l'autre côté du lit, j'observe le plafond.
« Je vais déménager. » Problème enfin balancé. Les nanas sont franchement chiantes, me dis-je, tout en soufflant. Je vais partir sous peu de Glasgow, et mon plus vieux plan cul est en train de me le reprocher, elle parle, argumente d'une morale, justifie par les sentiments. Je m'en fous. J'écoute d'une oreille faussement attentive et acquiesce d'un mouvement de tête. Ma main passe sur mon visage et mes yeux roulent.
« Tu ne m'aimes pas et je ne t'aime pas. C'est purement sexuel. Pourquoi diable toute cette agitation donc ? » J'ai beau lui jeter la vérité en pleine face, elle continue, putain j'ai en horreur ce type de conversation, ennuyante, conne et inutile.
« S'il te plaît, ta gueule, tu me files la migraine là. » Elle se relève, s'habille et se casse en claquant la porte de la chambre.
« Émouvants tes adieux. » Je hurle pour me marrer ensuite dans mon pieu. Annabelle. Certainement ma plus longue histoire, et comme toutes les autres, elle finit mal. Je crois que je suis un handicapé des sentiments, l'amour m'inspire une grande lassitude plutôt qu'une fièvre torride. Annabelle a dû devenir folle, ne serait-ce que pour oser penser que je resterai pour elle, la belle affaire. Les feux de l'amour, très peu pour moi. J'adhère plutôt au coup d'un soir ou relation autodestructrice. Ma vie est somptueuse, ornée d'or et d'argent. Cependant, j'ai besoin d'action, j'ai besoin d'autres distractions, j'ai simplement besoin de changer d'air, me carapater d'ici avec juste un sac sur le dos et un paquet de clopes. Enfin, le rêve d'évasion est un peu gâché, mes parents veulent financer mon voyage au complet et m'envoyer régulièrement de la thune. J'ai dit oui. En effet, je suis un gosse pourri gâté et je le vis bien. Je grille une cigarette, m'éjecte des draps, enfilant un caleçon au passage et reprend une toile fraichement commencée. Je pince mes lèvres devant le tableau, art abstrait, aujourd'hui je vais poursuivre sur cette voie là. Je manque d'imagination en ce moment, c'est assez dérangeant. Ma mère entre sans prévenir, ma mère prévient jamais. Elle me balance d'un ton désobligeant que j'ai plus d'inspiration pour me faire peindre le corps qu'une toile. Génial.
21 heures. Je dégage. Douché, habillé, direction le bar du coin. J'ai de la chance d'avoir des parents conciliants, ma liberté est essentielle à mon bien-être. J'embrasse la joue d'une amie avant de lui offrir une bière, elle me parle d'Annabelle, de son appel en pleure et blablabla. Décidément, elle me fait chier celle-là. Je me fais même insulté d'ordure misogyne et sans cœur, ah c'est beau la solidarité féminine, mon cul. En fin de compte, le sujet Anna' s'envole doucement au fil des verres et ce n'est guère pour me déplaire. Lucy est la seule personne qui va me manquer. J'aime sa franchise et ses sarcasmes, une qualité de plus en plus rare. J'ai grandi avec elle, un fantasme constant sur la Lucy, avec qui je prenais mes bains quand j'étais môme, à présent et hélas, les bains avec la fillette-bombe du quartier, c'est un temps révolu. Elle est plus apte à me castrer qu'à me monter dessus. C'est une sauvage. De plus, elle est lesbienne. A force de me fréquenter, les filles sont devenues plus ravissantes à ses yeux que les mecs. Et elle m'a précisément avoué cela de cette façon. C'est agréable comme compliment. Je pousse les nanas à l'homosexualité et les hommes à l'hétérosexualité, je devrai réviser mon jugement sur mes performances.
Qui vivra verra.
Vous avez un nouveau message. Reçu aujourd'hui à 4h07.
« […]
Mais non, mais non, ils me reconnaissent plus c'est normal. Forcément, je change de personnalité. [blanc] Je dors par terre de toute façon, j'ai un truc dans le cul, alors au point où j'en suis... [blanc] Allez... Chouchou ? Lapin ? [blanc] Elle doit dormir, bonne nuit mon cœur ! [blanc] Merde comment on raccroche ici ? Ah ouais c'est là. »
Fin du message.
Le lendemain, elle me fait écouter ce fabuleux message. Super. J'ai raconté ma vie à une banale connaissance, sur son répondeur téléphonique. Tabbie à l'hôpital, Noé avec un mec, j'ai rien trouvé de mieux que me déchirer tout seul la gueule pour clore l'histoire. Putain, ça craint. Je vais me ressaisir.
« Sid' ou l'art d'assassiner l'art en lui-même. Perdu, paumé, il vaque çà et là, sautille, fume, danse, hurle et baise où bon ça lui chante Il se définit comme un suppôt de la liberté. Gênant, extraverti, vulgaire, optimiste, désaxé, immature, inconscient, il s'enfonce au gré des tréfonds les plus brûlants de ses sentiments et joue sans se rendre compte du mal qu'il peut causer. Accessoirement, il devrait envisager d'abandonner la peinture pour le bien de l'humanité toute entière. Sid est un anticonformiste, à sa manière. »
→ LEVEL 3 ; traverser le monde de locoroco à la recherche de petit bouton d'or Je voudrais pas crever, sans avoir essayé de porter une robe sur les grands boulevards, sans avoir regardé dans un regard d'égout, sans avoir mis mon zobe dans des coinstots bizarres.
La mort n'est guère un sujet que j'affectionne, je ne m'imagine pas sous terre ou en cendres, je veux l'éternité. Hélas, pas besoin de le dire : je peux toujours rêver. La vie est si belle et la mort si triste. Cela paraît logique, en effet, c'est logique. Je ne veux pas me perdre. Il y a un bon côté cela dit, mon talent ne sera reconnu qu'après ma mort, car la lumière se fait sur les tombes. Puisque mourir vieux est une chance dépassée, puisque le temps s'écoule aussi vite que le vent, ma fin sera prématurée. Ô non, je n'ai guère la folle idée de crever la gueule ouverte d'une overdose, d'un coma ou que sais-je, éventuellement d'un cancer des poumons et encore. Il est évident qu'à 80 piges, je ne serai plus là. Ma vie est beaucoup trop mouvementée pour cela. Je devais faire un choix. L'amusement extrême ou l'ennui régulier. J'ai opté pour la première option, plus alléchante, jouissive. Le juste milieu ? Très peu pour moi. Tout ou rien. Et je présume que c'est justement ce principe à la con qui signera mon arrêt. Un jour, je ferai une connerie et je n'aurai guère le temps de la regretter, boum. La simplicité est un concept qui m'inspire une grande fascination, après tout, ne vaut-il pas mieux vivre simplement ? On a beau faire on a beau dire, la complexité naturelle de l'humain engendre généralement une existence tout aussi absconse que lui-même. La simplicité est plus difficile à atteindre, je ne veux pas me noyer dans les abysses de l'esprit ou que sais-je. Ainsi, je désire une mort simple.