❝ Ne prenez pas la vie trop sérieusement. Vous n'en sortirez jamais vivants. ❞

J'étends les bras, me retourne. Je heurte un corps inconnu. Je laisse mes doigts glisser sur sa peau de soie et suivre le contour de son profil. Elle pousse un petit gémissement. J'ouvre les yeux. Je suis allongée dans un lit qui n'est pas le mien aux côtés d'une jeune femme blonde et nue. Je cherche vainement à me rappeler des évènements de la veille mais j'imagine que je me suis bourrée la gueule un peu trop. Le trou noir. Ouais, j'me rappelle de rien. Mais aux vues de la situation, ce n'est pas bien compliqué de deviner ce qu'il s'est passé. J'ai trop bu et j'ai fini par passer la nuit chez cette fille, cette inconnue. Cela m'est égal, je n'éprouve aucune honte à laisser l'alcool prendre le contrôle et à fréquenter diverses partenaires. Les hommes peuvent bien coucher à droite à gauche sans qu'on ne leur dise rien, au pire on les traitera de salauds. Cela fait peut-être de moi une pute. J'm'en fous. La vie est trop courte pour ne pas la vivre à fond et en profiter autant que possible. Trop courte pour s'embarrasser du regard des autres. A quoi bon retenir ses pulsions quand on peut les laisser déferler et en profiter comme jamais ? D'façon, ça ne me manque jamais de ne pas avoir de copine. C'est plus facile comme ça. Je vis ma vie comme je l'entends, j'fais ce que je veux sans m'embarrasser de savoir si ça pose un problème à quelqu'un. Et puis c'est pas ma faute, j'suis pas douée pour les relations de couple. C'est beaucoup mieux comme ça. C'est pour ça que je me lève sans bruit. J'm'étire avec un miaulement, parcours la pièce des yeux à la recherche de mes vêtements. J'finis par dénicher mes sous-vêtements, et mon tee-shirt des Doors trois fois trop grand mais impossible de mettre la main sur mon jean. Tant pis, j'enfile le tout, j'constate que mon tee-shirt tout froissé suffit à faire office de robe. Parfait, pas super présentable mais au pire, j'm'en fous. Le miroir m'offre le reflet d'une fille qui a un peu trop forcé sur la boisson. J'pique son rouge à lèvres et m'en remets une couche, j'essuie le mascara qui a coulé pendant la nuit. Voilà, c'est déjà mieux. La blonde dort toujours. Faut dire qu'elle est vachement jolie, paisible comme ça, ses cheveux blonds étalés sur l'oreiller. Un sourire s'incruste sur ma bouche. Je me penche sur ma compagne d'un soir. J'laisse mon emprunte sur sa joue. Elle a un petit sourire mais ne bouge pas. Tant mieux, j'aime pas les adieux. J'prends mes docs à la main et j'm'efface de sa vie sur la pointe des pieds.

Dehors, j'constate qu'il est pas trop tôt. Passé midi, je dirais. En même temps, vu l'heure à laquelle j'me suis couchée, c'est compréhensible. D'façon, c'est pas comme si quelqu'un m'attendait. Minute. C'est exactement ça. C'est l'illumination dans mon cerveau, shit, j'étais supposée retrouver Némésis. Je jette un coup d’œil à ma montre. Avant de réaliser que je n'ai pas de montre. Du coup, je sors mon portable. Merde. Je suis en retard. Comme d'habitude. De toute façon, elle me connait bien, Némésis, elle sait que la ponctualité et moi, ça fait deux. Voire trois, vu que la plupart du temps, y a un troisième inconnu dans l'équation. Aujourd'hui, la blonde en fait office. Du coup, j'suis à la bourre quand j'arrive au Fantasy. J'lui dépose un baiser sur la joue et lui offre la clope que j'me suis allumée pour me faire pardonner. J'me sens encore légèrement nauséeuse mais ça m'empêche pas de commander un verre de manzana. « Comment tu vas, Nem ? » j'lui demande avec un sourire narquois. Elle hausse un sourcil. Elle aime pas que je l'appelle Nem. Elle trouve que ça fait bouffe. La dernière fois elle m'a demandé si j'aimerais qu'on m'appelle Sushi. J'lui ai dit qu'elle pouvait toujours essayé mais elle y a renoncé, j'crois. J'me sors une cigarette, glisse ma main dans sa poche et m'approprie son briquet. J'allume ma clope et je lui rends le briquet, lui soufflant ma fumée au visage.